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Page:Wagner - Tristan et Yseult, 1886, trad. Wilder.djvu/22

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ACTE PREMIER

Et Marke même ? — Est-il un choix
Plus digne de flatter ton âme,
Ô ma gentille dame ? —
Un prince illustre, au noble cœur,
Qui porte autour du front la palme du vainqueur,
Que sert le preux le plus fidèle…
Dis ! — parle ! — réponds, ma belle !
Quel trône vaut celui qui s’offre à toi ?

YSEULT,
regardant fixement dans le vague.

Sans qu’il m’aime, ce cœur superbe,
Le voir sans cesse…près de moi !…
Pourrais-je endurer ce supplice acerbe ?

BRANGAINE.

Qu’oses-tu dire ? — Sans t’aimer ! —

Elle s’approche d’Yseult, en l’enveloppant de ses caresses.

Mais quel mortel, au cœur sensible et tendre,
Peut te voir, t’approcher, sans se laisser surprendre,
Sans se laisser charmer ? —
S’il existe un tel homme,
Chère Yseult, qu’on le nomme,
Et je saurai le désarmer ;
D’un feu soudain, d’une immortelle flamme,
Tu verras s’embraser son âme !

Se serrant contre Yseult et d’une voix mystérieuse.

L’art de ta mère a tout prévu,
En confiant à ta servante
Un philtre d’étrange vertu,
Que prépara sa main savante.

YSEULT,
d’un ton sombre.

Ma mère aimée, avait raison.