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La mer et les prés, les oiseaux, leurs chants et leurs nids, les aspects tranquilles et souriants de la nature, les rêveries que suggèrent les choses à ceux qui savent rêver : telle est la source principale de M. André Lemoyne mais il en a d’autres. Ce rêveur est aussi un penseur dont l’âme recueillie est, à l’occasion, une âme méditative. L’amour du Beau, du Simple et du Vrai est le fond de sa philosophie ingénue. »



MATIN D'OCTOBRE


Le soleil s’est levé rouge comme une sorbe
Sur un étang des bois ; — il arrondit son orbe
Dans le ciel embrumé, comme un astre qui dort ;
Mais le voilà qui monte en éclairant la brume,
Et le premier rayon qui brusquement s’allume
Jette aux feuilles de hêtre un pétillement d’or.

Et sur les verts tapis de la grande clairière,
Ferme dans ses sabots, marche en pleine lumière
Une petite fille (elle a sept ou huit ans).
Avec un brin d’osier menant sa vache rousse,
Elle connaît déjà l’herbe fine qui pousse
Vive et drue, à l’automne, au bord frais des étangs.

Oubliant de brouter, parfois la grosse bête,
L’herbe aux dents, réfléchit et détourne la tête,
Et ses grands yeux naïfs, rayonnants de bonté,
Ont comme des lueurs d’intelligence humaine.
Elle aime à regarder cette enfant qui la mène,
Belle petite brune ignorant sa beauté.