Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t1.djvu/567

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA SOIF


C’est la plaine sans borne, aride, et toute en sable.
Le pèlerin s’en va sous un souffle d’en haut.
Le Courage et la Foi ne lui font pas défaut,
Mais l’homme est bien fragile et la chair périssable.
Il a marché des jours de son pied inlassable
Vers le but qu’il appelle avec un court sanglot.
Et le Désert s’étale et roule, comme un flot,
Sa poudre âpre, mêlée à l’air indispensable.
Il étrangle, il étouffe, il s’épuise. Il a faim ;
Mais surtout il a soif. Sa gourde est vide. Enfin,
Le voici qui se penche à la source trouvée.
Il boit ! Il boit, ravi, l’eau pure jaillissant ;
C’est une volupté qu’il n’avait pas rêvée,
Dont il a presque honte en son cœur innocent.


(Les Chevauchees de Joconde.)


LE SOMMEIL


Seigneur, Dieu des troupeaux qu’un chien fidèle garde,
Accorde-nous les longs repos des nuits d’été,
Lorsque le vagabond sur la lande arrêté
S’endort, voluptueux, sous la lune blafarde !
Seigneur, Dieu des vaisseaux que l’homme fou hasarde
Sur la mer hypocrite et le flot entêté,
Accorde-nous l’Etoile et la sérénité,
Le grand sommeil à bord lorsque le vent s’attarde !
Seigneur, Dieu des hameaux tassés, des clochers purs,
Lorsque l’ombre est tombée en fermant la demeure,
Epargne-nous l’effroi de nos destins obscurs !
Laisse l’Homme oublier l’inconstance de l’Heure,
Son effort quotidien et ses labeurs si durs…
Donne des Songes d’or au gueux dont le jour pleure !


(Les Chevauchées de Joconde.)