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CRÉATION PAR LOI.

ques-unes étaient avantageuses. La raison pour laquelle les femelles ne sont pas ornées de plumes aussi brillantes que les mâles est suffisamment claire, l’éclat leur serait nuisible en les rendant trop apparentes pendant l’incubation ; la survivance des plus aptes a donc favorisé l’apparition de cette teinte vert foncé qu’on voit sur le dos d’un si grand nombre d’oiseaux-mouches femelles, et qui les protègent le mieux pendant qu’elles accomplissent les importantes fonctions de couver et d’élever les petits.

Si l’on a présentes à l’esprit les lois dont l’action continue régit la multiplication des êtres, la variation et la survivance des plus aptes, le développement de la beauté variée et l’adaptation harmonieuse aux conditions extérieures paraissent des résultats, non-seulement concevables, mais nécessaires.

L’opinion que je combats dans ce moment n’a d’autre base qu’une analogie supposée entre l’esprit du Créateur et le nôtre, en ce qui concerne le goût du beau en lui-même ; mais si cette analogie existe véritablement, alors il ne doit y avoir dans la nature aucun objet qui soit laid ou désagréable à nos yeux : or il est indubitable qu’il y en a un grand nombre. S’il est certain que le cheval et le daim sont beaux et gracieux, en revanche l’éléphant, l’hippopotame, le rhinocéros et le chameau sont l’inverse. Le plus grand nombre des singes ne sont pas beaux ; la plupart des oiseaux n’ont pas de belles couleurs, et un grand nombre d’insectes et de reptiles sont positivement laids. Or, d’où peut venir cette laideur, si l’esprit du Créa-