Page:Walras - L’Économie politique et la justice.djvu/75

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deux publicistes a sur le premier l’avantage de la logique. Ne reconnaissant à la terre aucune valeur de capital, M. Proudhon en nie le revenu ; il ne se rend pas lui-même un compte exact de sa doctrine, mais c’est ainsi qu’on s’explique qu’il considère le fermage comme une exaction du propriétaire. M, Thiers voulant légitimer le revenu d’un capital qu’il méconnaît, n’a d’autre ressource que d’intervertir à plaisir le rôle du propriétaire et celui de l’agriculteur pour nous représenter le fermage comme un salaire de travailleur.

Les physiocrates et les économistes anglais peuvent ainsi passer pour avoir entrevu successivement l’une et l’autre moitié de la vérité touchant la question de l’origine de la valeur d’échange. Seulement on eût pu demander aux premiers : — Si toute valeur vient de la terre, d’où vient la valeur de la terre ? Et l’on pouvait aussi bien demander aux autres : — Si toute valeur vient du travail, d’où vient la valeur du travail ?

J.-B. Say s’efforça de trouver un fait commun qui pût expliquer et la valeur de la terre et la valeur du travail ; et il crut le trouver, avec Mac-Culloch, dans Futilité. C’était encore un pas vers la vérité vraie. Le malheur est que l’utilité n’est que la condition de la valeur, et qu’il faut y joindre le fait de la limitation dans la quantité pour avoir enfin, dans le fait de la rareté, la cause et la mesure de la valeur d’échange qui constitue, dans la terre, les facultés personnelles et les capitaux artificiels, en capitaux et revenus, la richesse sociale.