Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fut clair et serein, avec de petites brises de vent, qui nous menaçoient de calme. La plupart de nos Capitaines prirent cette occasion pour rendre visite à Mr. Anson, mais dans le tems qu’ils étoient à bord du Commandeur, ils furent effrayés par une flamme soudaine, qui sortit du Gloucester, et qui fut suivie par une épaisse fumée. Ils furent cependant bientôt rassurés en apprenant, que cette flamme n’étoit causée que par une étincelle, sortie de la forge, et tombée sur quelque Poudre et d’autres matières combustibles, qu’un Officier préparoit pour un cas d’engagement avec l’Escadre Espagnole, et qu’elle avoit été d’abord éteinte.

Nous trouvames en cette occasion, ce que les observations nous ont toujours confirmé ; c’est que sous ces Latitudes avancées vers le Sud, le beau tems est toujours de fort courte durée, et que quand il est extrêmement beau, c’est un présage certain de Tempête. Le tems calme et serein de la soirée aboutit à une nuit très orageuse. Le vent, qui étoit S. O. ayant fraichi avec la nuit, et augmentant de violence continuellement, jusqu’au lendemain à neuf heures du matin, devint si fort, que toute l’Escadre fut obligée d’amener, et de rester avec la Misaine bourcée jusqu’à onze heures du soir. Pendant ce tems, nous eumes de quarante-trois jusqu’à cinquante-sept brasses d’eau, fond de sable noir & de gravier, et par une observation que nous fimes à midi, nous trouvames que le Courant nous avoit fait avancer vers le Sud, douze milles plus que ne portoit notre estime. Vers minuit, le vent diminuant, nous remimes nos voiles, et faisant route vers le Sud, nous découvrimes le matin, pour la prémière fois, la Terre de Feu qui s’étendoit du S. vers l’O. au S. E. demi-quart à l’Est. Cette vue ne nous réjouit guère, car elle ne nous offrit que des Montagnes, étonnantes par leur hauteur, et couvertes de Neige. Quoiqu’il ne soit guère possible de représenter tout ce que ce spectacle avoit de hideux, la Planche suivante est cependant assez exacte pour aider le Lecteur à se former quelque idée de cette affreuse Côte. Dans la Planche (a) est l’ouverture du Détroit de le Maire, (5) le Cap St. Diego, (1) (2) (3) trois Mondrains nommés les trois Frères, et (4) Monte Gorda, Montagne fort élevée, plus avant dans les terres, et qui paroit au dessus des trois Frères. Nous suivimes cette Côte toute la journée, trouvant par la sonde entre quarante et cinquante Brasses d’eau, fond de pierres et de gravier. Comme nous comptions de passer le Détroit le lendemain, nous mimes à la cape dès qu’il fut nuit, de peur de le dépasser, et nous employames ce tems à nous préparer aux Climats ora-