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la lampe ; on la mêloit avec de la poix, pour goudronner les côtés du Vaisseau, ou avec des cendres, au-lieu de suif dont nous manquions, pour espalmer le Vaisseau. Quelques-uns de nos gens furent employés à saler de la Morue : l’idée en vint au Commandeur, à l’occasion de deux Pecheurs de Terre-Neuve, que nous avions à bord du Centurion : toute cette Morue salée, dont nous fimes une assez considérable provision, ne fut pas de grand usage ; on la négligea parce qu’on crut qu’elle causoit trop le Scorbut, ainsi que toutes les autres Salines.

Nous avions, comme je l’ai dit, un four de cuivre à terre, et l’on y cuisoit du pain frais, pour les malades : mais la principale provision de farine avoit été mise à bord de l’Anne. J’ai oublié de dire, que le Tryal nous avoit appris à son arrivée, qu’il avoit trouvé cette Pinque le 9 de Mai, sur les Côtes du Chili, et qu’ils avoient vogué de compagnie pendant quatre jours, au bout desquels, un coup de vent les avoit séparés. Cette nouvelle nous avoit fait croire que l’Anne pourroit nous rejoindre bientôt, mais les mois de Juin et de Juillet s’étant écoulés, sans que nous la vissions paroître, nous commençames à croire qu’elle avoit péri, et dès-lors le Commandeur ordonna de diminuer les rations de pain. Ce n’étoit pas à l’égard du pain seulement que nous craignions la disette, depuis que nous fumes arrivés dans cette Ile nous nous apperçumes que le premier Munitionnaire, que nous avions eu, avoit négligé de prendre à bord bien des provisions, que Mr. Anson lui avoit pourtant expressément ordonné de recevoir de l’Office de l’Amirauté. Ainsi nous avions plus d’une raison de regretter notre Vaisseau d’avitaillement, dont la perte nous paroissoit de jour en jour plus probable. Cependant le 16 d’Aout, vers le midi, nous découvrimes une voile du côté du Nord ; et là-dessus, le Centurion fit signal d’un coup de Canon, pour rappeller tous ceux qui étoient à terre. Ils obéirent sur le champ, et se rendirent sur le rivage, où ils trouvèrent les Chaloupes qui les menèrent à bord. Nous fumes bientôt prêts à recevoir le Vaisseau que nous avions en vue, ami ou ennemi. Cependant nous nous épuisions en conjectures sur son sujet : quelques-uns croyoient que c’étoit le Tryal, retournant de sa course vers l’Ile de Masa-Fuéro ; mais le Vaisseau approchant plus près, nous vimes qu’il portoit trois Mâts, et qu’ainsi ce ne pouvoit être le Tryal. Cette particularité fit naitre d’autres conjectures, les uns vouloient que ce fût la Severne, d’autres la Perle, et plusieurs qu’il n’appartenoit pas à notre Escadre : mais à trois heures après-midi toutes disputes cessèrent, et on re-