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Page:Walter - Voyage autour du monde fait dans les années 1740, 1, 2, 3, 4, 1749.djvu/415

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au-delà de ce Détroit, jusqu’à ce qu’il reçût de nouveaux ordres de Мг. Anson.

Ces précautions ne furent pas ignorées des Chinois, et elles devoient naturellement influer sur leurs conseils. On doit croire qu’ils avoient bonne envie de se faire payer leurs Droits ; moins peut-être pour l’importance de la somme, que pour soutenir leur réputation d’adresse et de dextérité dans les affaires, et pour éviter la honte d’être réduits à renoncer à une prétension, sur laquelle ils avoient insisté. Cependant ils voyoient bien qu’il n’y avoit d’espérance de réussir pour eux, que dans la violence, et que Mr. Anson avoit pris ses mesures en pareil cas. Je crois bien, que c’est ce qui les porta à laisser tomber leurs prétensions, plutôt que de s’engager dans des voies de fait, qui ne pouvoient aboutir qu’à la ruine du commerce de leur Rivière.

Quoiqu’il y ait toute apparence, qu’ils étoient alors dans ces sentimens, ils ne purent cependant se départir tout-à-fait de leurs artifices ordinaires. Le premier d’Octobre, au matin, comme le Commandeur s’appretoit à partir pour Canton, son Truchement lui vint dire de la part du Mandarin qui avoit inspection sur les Vivres, qu’il avoit reçu une Lettre du Viceroi, qui souhaitoit que le Commandeur retardât son voyage de deux ou trois jours. Dès l’après-midi un autre Truchement vint à bord, et dit d’un air effraié à Mr. Anson, que le Viceroi l’avoit attendu ce jour-là ; que le Conseil avoit été assemblé, et les Troupes sous les armes pour sa réception ; ajoutant que le Viceroi étoit fort irrité, et le Truchement du Commandeur étoit déja en prison, chargé de fers, parce qu’on attribuoit ce contretems à sa négligence. Cette nouvelle, qui avoit quelque apparence de vérité, fit beaucoup de peine à Mr. Anson, et lui fit soupçonner qu’on lui brassoit quelque fourberie, dont il ne voyoit pas le fond ; et quoique dans la suite, il parut que toute cette belle histoire, n’étoit qu’une fiction fausse de tous points, elle fut si bien soutenue par les artifices des Marchands Сhinois de Canton, que trois jours après le Commmandeur reçut une Lettre signée de tous les Supercargos des Vaisseaux Anglois, qui se trouvoient dans ce Port, qui lui marquoient leur inquiétude sur ce sujet et leur crainte que l’on n’insultât sa Chaloupe, s’il alloit à Canton avant que le Viceroi n’eût reçu des éclaircissemens satisfactoires. Mr. Anson répondit à cette Lettre, qu’il ne croyoit pas avoir rien à se reprocher à l’égard du Viceroi, mais que tous ces bruits lui paroissoient avoir été répandus par les Chinois, en vue de l’empêcher de rendre visite au Viceroi ; qu’ainsi, il partiroit sans faute pour Canton le 13 d’Octobre