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souffrir les trois autres Vaisseaux de l’Escadre, qui gagnèrent la rivière de la Plata. Ces derniers ayant un besoin extrême de Mâts, de Vergues, d’Agrés, en un mot, de tout ce qui est nécessaire sur un Vaisseau, et ne pouvant rien trouver de pareil ni à Buenos Ayres, ni dans aucun autre endroit appartenant aux Espagnols, Pizarro dépêcha une Barque d’avis avec une Lettre de change à Rio Janeiro pour acheter des Portugais ce qui lui manquoit. Il envoya en même temps un Exprès par terre à San Jago dans le Chili, pour être expédié delà au Viceroi du Pérou, et lui demander une remise de 200 000 écus, à prendre du Trésor Royal de Lima : l’Amiral Espagnol croyant cette somme absolument nécessaire pour avitailler les Vaisseaux, et les mettre en état de tenter à nouveau le passage dans la mer du Sud, dès que la saison, devenue plus favorable, pourroit le permettre. Les Espagnols rapportent comme une chose merveilleuse, et elle est telle réellement, que l’Indien, qui servoit de Messager, quoique dépêché en Hiver, quand les Cordilleras sont couvertes de neige, ne mit que treize jours à se rendre de Buenos Ayres à S. Jago dans le Chili, quoique ces deux Villes soient éloignées l’une de l’autre de trois cens lieues d’Espagne, dont il en avoit dû faire près de quarante à travers les neiges et les précipices des Cordilleras.

La réponse du Viceroi du Pérou au message de Pizarro ne fut rien moins que favorable. Au-lieu des deux cens mille écus, que ce dernier avoit demandés, le Viceroi ne lui en fournit que cent mille, ajoutant pour ses raisons, que ce n’étoit encore qu’avec bien de la peine qu’il avoit pu lui procurer cette somme. Les Habitans de Lima, qui jugeoient la présence de Pizarro nécessaire à leur sureté, furent très mécontens de ce procédé, et dirent hautement à qui voulut les entendre, que ce n’étoit pas le manque d’argent, mais les vues intéressées de quelque-uns des Favoris du Viceroi, qui avoient empêché que Pizarro n’eût obtenu toute la somme qu’il avoit demandée.

La Barque d’avis, envoyée à Rio Janeiro, ne repondit aussi qu’en partie au but qu’on s’étoit proposé en la dépêchant. Car quoiqu’elle rapportât une quantité considérable de goudron, de poix, et de cordages, il ne lui fut cependant pas possible d’avoir ni mâts ni vergues. Par un surcroit de malheur, Pizarro qui comptoit de recevoir quelques mâts du Paraguay se trouva trompé dans son attente ; car un Charpentier, à qui il avoit confié une grande somme d’argent et qu’il avoit envoyé dans le païs, que je viens de nommer, pour y couper des mâts, au-lieu