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France, le mérite n’est pas récompensé ; en Allemagne, vous seriez honoré, considéré, vous auriez une chaire ; le moindre instituteur a ses mille thalers… au lieu que vous végétez. Ah ! quelle abomination !

— Sans doute, vous n’avez pas tort, lui répondis-je, on néglige l’instruction… on ne paye pas assez les instituteurs. Cela fait le plus grand tort au pays.

— Ah ! je crois bien, dit-il, chez nous l’instruction est libre, nous avons des associations en masse pour l’instruction ; nous avons des bibliothèques, nous avons de tout, et principalement des hommes instruits, tels que vous, et qu’on entoure de respect. »

Tout ce qu’il me disait sur ce chapitre était juste, mais cela ne faisait pas mon compte ; et comme je ruminais en moi même au moyen de revenir à la question, il me répéta, en me montrant une chaise :

« Mais asseyez vous donc, mon cher monsieur Auburtin ; asseyez-vous près de la cheminée, il fait froid aujourd’hui.

— Oui, monsieur, lui dis-je en m’asseyant, il fait très froid… J’étais venu…

— Écoutez, fit-il en m’interrompant encore, puisque nous sommes là comme de vieux amis, il faut que je vous demande quelque chose. »

Alors l’impatience me prit, et je dis :

« Moi je veux aussi vous demander quelque chose ; je voudrais savoir quand vous partirez, car vous avez raison : je suis un pauvre homme chargé de famille, et vous pensez bien que je ne peux pas vous avoir toujours sur mon dos, vous entretenir, vous nourrir, etc.

— Justement, fit-il, j’ai déjà eu la même idée, nous sommes d’accord. »

Sur cette assurance, je m’appaisai ; et je lui demandai :

« Quand partez-vous ? Est-ce que vous voulez aller à l’ambulance de Saarbrück ? Les deux voitures passent demain