Page:Webb - Sept pour un secret, 1933.djvu/18

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« Et durant toutes ces journées de printemps, de la façon la plus étrange et la plus mystérieuse, des fils invisibles se tissaient entre la friche sauvage et quatre personnes très différentes. Un fil se reliait à Gillian Lovekin, en sorte que quand elle passait devant la friche en allant au Repos de la Sirène ou que, le bras d’Elmer autour de sa taille, elle se promenait sur la lande, et regardait ses lignes droits et sombres au-dessus de l’eau pâle, elle frissonnait. Un second fil rejoignait la femme muette et la faisait trembler quand elle y ramassait du bois, — car on n’en trouvait nulle part ailleurs, — et quand elle faisait d’étranges et secrètes courses, dont on entendra parler davantage. Un troisième tenait Elmer, en sorte qu’il avait horreur de cet endroit, comme il l’avait détesté le premier soir où il l’avait vu, détesté tout en se sentant attiré par une curiosité lancinante. Et le quatrième, enfin, ferme et tendu, liait Robert Rideout, réveillait en lui l’impression que quelque chose l’attendait là, dans cette petite lande de friches, où l’épine noire tressait sa couronne piquante, où l’eau gémissait et où la neige s’attardait longuement. Quelque chose, une décision importante, un événement qui ferait de lui à jamais un dieu ou une pauvre et misérable créature, se préparait pour lui dans la friche sauvage.

On a bien l’impression que, dans cette page, Mme Mary Webb nous livre son secret. Il y a quelque chose d’éternellement tissé dans tous ses romans entre la terre dont ils sortent et elle-même. Ils sont comme l’émanation à demi animale, à demi spirituelle des champs, des landes, des lacs, des forêts, des maisons de