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SEPT POUR UN SECRET…

« Oh, pourquoi diable ai-je commis ce crime ? » demanda-t-il aux objets en général.

Et la seule réponse, l’horrible et répugnante réponse était : par lubricité. Il n’y en avait pas d’autre possible, si l’on cherchait le motif.

« Ça, c’est trop, vraiment trop », se dit-il. Il avait toujours mené une vie si propre. Ce n’était pas un saint, mais pas un sensuel non plus. Il ne courait pas après les filles, il en devenait amoureux. Il avait, une fois « eu des histoires », comme dit charitablement le langage campagnard, mais il y avait eu dans son aventure du romanesque, du plaisir et de la beauté, quelque chose qui différait beaucoup de la pure débauche. Et à présent…

Il appuya sa tête sur ses bras et gémit ; puis, le visage farouche, les traits tirés, il écrivit sa lettre. Il appela à son aide l’artiste impersonnel qui était en lui, et composa un chef-d’œuvre de remords, de confession, de terreur et d’artifice. Il se sentait avili. Quand il eut fini, il sortit sous les tourbillons de neige et se mit la tête sous l’eau glacée de la pompe.

La neige cessa le mardi matin ; le vent avait tourné au Sud dans la nuit. Une brise douce et humide soufflait de l’auberge vers la ferme. Les chrysanthèmes attardés dans la petite plate-bande de sa mère débarrassèrent leur figure de la neige ; des trous noirs commençaient à paraître sur la lande. Le fracas des paquets de neige qui glissaient des toits retentissait par intervalles avec un bruit impérieux d’ébranlement.

Le dégel avait commencé. Le sursis que s’était accordé Robert était fini. Avec un battement d’ailes argenté, les pluviers s’enfuyaient vers les riches et sombres labours. Les routes, estimait Robert, seraient praticables le lendemain. Le fusil était tout prêt dans un coin, la lettre posée sur la table.