Page:Weil - Écrits de Londres et dernières lettres, 1957.djvu/232

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sûr qu’elles seraient d’actualité. Relatives à Krishna, par exemple…

Chère M.[1], si c’est curieux comme tu aimes être heureuse, c’est curieux aussi comme j’aime que tu sois heureuse. Je ne suis pas moins incorrigible sur ce point. Je souhaite passionnément que l’air de New York soit ensoleillé et grisant, qu’il y ait de belles choses dans la Branch de la Public Library, de menus incidents excitants dans la vie quotidienne, quelques relations humaines agréables et intéressantes (aies-en donc avec les évangélistes voisins, s’ils sont toujours là). J’allais ajouter quelques films ou pièces de théâtre qui en vaillent la peine, mais j’ai trop peur des grippes. Quant aux services du dimanche matin à Harlem, vous n’appréciez pas…

Dans mes dernières lettres, je vous suggérais de vous adresser aux Belges pour votre voyage ici. Je vais encore prendre des informations pour vérifier si vous pouvez venir sans job, mais ça m’étonnerait. Il n’y en a pas chez les Français, quoique le besoin existe. Mais il est impossible de faire organiser de nouvelles choses. Les contacts personnels sont très rares ici, quoique tous les bureaux soient dans le même quartier.

J’aime de plus en plus Londres. Mais j’y circule peu. Je n’ai pas le temps. Je vous ai dit que j’ai trouvé une chambre dans le quartier de Notting Hill ? Je l’aurais parié ! J’ai été idiote de ne pas chercher là tout de suite (adresse : c/o Mrs. Francis, 31 Portland Road, Holland Park, London, W. 11). Elle est très jolie, au haut d’un cottage, avec des branches d’arbre pleines d’oiseaux, et le soir d’étoiles, juste devant la fenêtre.

C’est bizarre à quel point les pubs (que je fréquente très peu, rassurez-vous) ressemblent peu à nos bistros. — La police anglaise est quelque chose de délicieux.

  1. Ici, et en plusieurs autres passages, l’initiale M. représente le surnom familial de la mère de Simone Weil.