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La propriété collective n’est pas définie par un titre juridique, mais par le sentiment d’un milieu humain qui regarde certains objets matériels comme un prolongement et une cristallisation de lui-même. Ce sentiment n’est rendu possible que par certaines conditions objectives.

L’existence d’une classe sociale définie par le manque de propriété personnelle et collective est aussi honteuse que l’esclavage.

L’âme humaine a besoin de châtiment et d’honneur.

Tout être humain qu’un crime a mis hors du bien a besoin d’être réintégré dans le bien au moyen de la douleur. La douleur doit être infligée en vue d’amener l’âme à reconnaître un jour librement qu’elle a été infligée avec justice. Cette réintégration dans le bien est le châtiment. Tout être humain innocent, ou qui a fini d’expier, a besoin que son honorabilité soit reconnue comme étant égale à celle de tout autre.

L’âme humaine a besoin de participation disciplinée à une tâche commune d’utilité publique, et elle a besoin d’initiative personnelle dans cette participation.

L’âme humaine a besoin de sécurité et de risque. La peur de la violence, de la faim, ou de tout autre mal extrême, est une maladie de l’âme. L’ennui causé par l’absence de tout risque est aussi une maladie de l’âme.

L’âme humaine a besoin par-dessus tout d’être enracinée dans plusieurs milieux naturels et de communiquer avec l’univers à travers eux.

La patrie, les milieux définis par la langue, par la culture, par un passé historique commun, la profession, la localité, sont des exemples de milieux naturels.

Est criminel tout ce qui a pour effet de déraciner un être humain ou d’empêcher qu’il ne prenne racine.

Le critère permettant de reconnaître que quelque part les besoins des êtres humains sont satisfaits, c’est un épanouissement de fraternité, de joie, de beauté, de