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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/114

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Dieu a souffert au lieu de l’homme — cela ne signifie pas que le malheur du Christ ait diminué si peu que ce soit le malheur des hommes, mais que par le malheur du Christ (aussi bien dans les siècles antérieurs que dans les siècles postérieurs) le malheur de tout malheureux prend une signification et une valeur d’expiation, si seulement il le désire. Le malheur prend alors une valeur infinie qui ne peut venir que de Dieu.

Toute expiation suppose que ce soit Dieu qui expie.

Les difficultés de la notion de rédemption, et les absurdités dont elle est entourée, obligent à examiner de plus près la notion même de châtiment, et sa relation avec la notion de sacrifice.

Tout ce que dit saint Paul sur la rédemption est acceptable seulement si on regarde l’humanité comme un seul être vivant — qui a péché au temps d’Adam, a été sous la tutelle de la loi, atteint la pureté et la liberté dans la mort et ressuscite.

L’attente de la fin imminente du monde est essentielle au christianisme primitif et explique quantité d’anomalies. C’était sans doute la partie la plus populaire du message.


Le Jugement s’exercera ainsi. — L’âme qui vient de traverser ce que les hommes nomment la mort reçoit soudain la certitude, irrésistible, ne laissant place à aucun doute, que toutes les fins de toutes les actions accomplies pendant la vie étaient illusoires, y compris Dieu.

Avec cette certitude qui la pénètre tout entière, y compris la sensibilité, elle revit par la pensée toutes ses actions.

Alors, dans la plupart des cas, saisie d’horreur, elle désire le néant et disparaît.

Dans des cas rares, elle ne regrette rien ; ou au moins elle peut s’accrocher à certaines actions qu’elle ne regrette pas, parce qu’elles étaient inconditionnées, parce qu’elles étaient pure obéissance.

L’horreur ne la saisit pas, elle continue à être tournée amoureusement vers le bien.

Mais sentant que sa personnalité la sépare du contact