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Page:Weil - La Connaissance surnaturelle, 1950.djvu/263

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« automata ». De là vient automatisme. C’est dire de la manière la plus claire, la plus précise, qu’il y a une mécanique spirituelle, aux lois aussi rigoureuses que l’autre, mais autre.

σπείρων, le semeur ; le même mot se dit du mâle qui féconde la femelle. Ce double sens est sans doute contenu dans les paraboles de l’Évangile sur les semailles. « La semence est la parole de Dieu. » La semence est un souffle igné, pneuma. La semence qui est entrée dans la Vierge était le Saint-Esprit, pneuma hagion. Le Saint-Esprit est aussi la semence qui tombe sur toute âme. Pour le recevoir, il faut que l’âme soit devenue simplement une matrice, un réceptacle ; quelque chose de fluide, de passif ; de l’eau. Alors la semence devient embryon, puis enfant ; le Christ est engendré dans l’âme. Ce que je nommais je, moi, est détruit, liquéfié ; à la place de cela, il y a un être nouveau, grandi à partir de la semence tombée de Dieu dans l’âme. C’est là être engendré de nouveau ; être engendré d’en haut ; être engendré à partir de l’eau et de l’esprit ; être engendré à partir de Dieu, et non pas de la volonté de l’homme ou de la volonté de la chair. Au terme de ce processus, « je ne vis plus, mais le Christ vit en moi ». C’est un autre être qui est engendré par Dieu, un autre « je », qui est à peine « je », parce que c’est le Fils de Dieu. Il n’y a pas d’« enfants adoptifs ». L’unique adoption, c’est que, comme un parasite pond ses œufs dans la chair d’un animal, Dieu dépose dans notre âme un sperme qui, parvenu à maturité, sera son Fils. C’est ainsi qu’Aphrodite céleste, qui est la Sagesse, sort des la mer. Notre âme doit être uniquement un lieu d’accueil et de la nourriture pour ce germe divin. Nous ne devons pas donner à manger à notre âme. Nous devons donner notre âme à manger à ce germe. Après quoi il mange lui-même, directement, tout ce qu’auparavant notre âme mangeait. Notre âme est un œuf où ce germe divin devient oiseau. L’embryon d’oiseau se nourrit de l’œuf ; devenu oiseau, il brise la coquille, sort, et picore des grains. Notre âme est séparée de toute réalité par une pellicule d’égoïsme, de subjectivité, d’il-