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pas bien et si ce qui peut-être n’est pas est le bien.

Mais pourquoi dire ce qui peut-être n’est pas ? Le bien ne possède certainement pas une réalité à laquelle l’attribut de bien serait ajouté. Il n’a pas d’autre être que cet attribut. Il n’a pas d’autre être que d’être le bien. Mais il a la plénitude de cette réalité-là. Cela n’a aucun sens de dire : le bien est, ou le bien n’est pas, mais seulement : le bien.

Les choses d’ici-bas existent. Aussi je ne détache pas d’elles celles de mes facultés qui ont rapport à l’existence. Comme il n’y a aucun bien dans les choses d’ici-bas, je détache d’elles simplement la faculté qui a rapport au bien, c’est-à-dire l’amour.

Sexualité. Il y a un mécanisme dans notre corps qui, quand 1] se déclenche, nous fait voir du bien dans les choses d’ici-bas. Il faut le laisser rouiller jusqu’à ce qu’il soit détruit.

Quoique je sache que les choses d’ici-bas ne méritent pas mon désir, pourtant j’y trouve mon désir attaché, et je n’ai pas d’énergie pour l’en arracher.

Les efforts de volonté sont illusoires.

Ma propre âme ne me croit pas.

Je puis seulement désirer désirer le bien.

Mais alors que les autres désirs sont tantôt efficaces et tantôt non selon le hasard des circonstances, ce désir est toujours efficace. Car le désir de l’or n’est pas de l’or ; au lieu que le désir du bien est un bien.

S’il arrive qu’un jour tout le désir contenu dans mon âme soit arraché aux choses d’ici-bas et dirigé entièrement et exclusivement vers le bien, ce jour-là je posséderai le souverain bien.

Dira-t-on que je n’aurai plus rien à désirer ? Si, puisque désirer sera mon bien. Dira-t-on que j’aurai encore quelque chose à désirer ? Non, puisque je posséderai l’objet de mon désir. Le désir sera mon trésor.

C’est pourquoi l’Écriture emploie à la fois l’image « Qui boira de cette eau aura toujours soif » et « qui boira de cette eau n’aura plus jamais soif ». Cette eau, c’est le bien.

Comme nous sommes dans le retournement, de même