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Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/155

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L’IMPOSSIBLE

La vie humaine est impossible. Mais le malheur seul le fait sentir.

Le bien impossible : « Le bien entraîne le mal, le mal le bien, et quand cela finira-t-il ? »

Le bien est impossible. — Mais l’homme a toujours l’imagination à sa disposition pour se cacher cette impossibilité du bien dans chaque cas particulier (il suffit, pour chaque événement qui ne nous broie pas nous-mêmes, de voiler une partie du mal et d’ajouter du bien fictif — et certains le peuvent, même s’ils sont broyés eux-mêmes) et, du même coup, pour se cacher « de combien diffère l’essence du nécessaire de celle du bien » et s’interdire de vraiment rencontrer Dieu qui n’est pas autre chose que le bien lui-même, lequel ne se trouve nulle part en ce monde.

Le désir est impossible ; il détruit son objet. Les amants ne peuvent pas être un ni Narcisse être deux. Don Juan, Narcisse. Parce que désirer