Page:Weil - La Pesanteur et la Grâce, 1948.djvu/89

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Il faut se déraciner. Couper l’arbre et en faire une croix, et ensuite la porter tous les jours.

Il ne faut pas être moi, mais il faut encore moins être nous.

La cité donne le sentiment d’être chez soi.

Prendre le sentiment d’être chez soi dans l’exil.

Être enraciné dans l’absence de lieu.

Se déraciner socialement et végétativement.

S’exiler de toute patrie terrestre.

Faire tout cela à autrui, du dehors, est de l’ersatz de décréation. C’est produire de l’irréel.

Mais en se déracinant on cherche plus de réel.