Page:Weil - Lettre à un religieux, 1951.djvu/31

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les pays chrétiens. Notre civilisation ne doit rien à Israël et fort peu de chose au christianisme ; elle doit presque tout à l’antiquité pré-chrétienne (Germains, Druides, Rome, Grèce, Égéo-Crétois, Phéniciens, Égyptiens, Babyloniens…). S’il y a cloison étanche entre cette antiquité et le christianisme, il y a la même cloison entre notre vie profane et notre vie spirituelle. Pour que le christianisme s’incarne vraiment, pour que l’inspiration chrétienne imprègne la vie tout entière, il faut reconnaître au préalable qu’historiquement notre civilisation profane procède d’une inspiration religieuse qui, bien que chronologiquement pré-chrétienne, était chrétienne en son essence. La Sagesse de Dieu doit être regardée comme la source unique de toute lumière ici-bas, même les lumières si faibles qui éclairent les choses de ce monde.

Et de même pour Prométhée. L’histoire de Prométhée, c’est l’histoire même du Christ projetée dans l’éternel. Il n’y manque que la localisation dans le temps et l’espace.

La mythologie grecque est pleine de pro-