Page:Weil - Lettre à un religieux, 1951.djvu/48

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est à la fois personnel et impersonnel. Il est impersonnel en ce sens que sa manière infiniment mystérieuse d’être une Personne diffère infiniment de la manière humaine. On ne peut saisir ce mystère qu’en employant à la fois, comme deux pinces, ces deux notions contraires, incompatibles ici-bas, compatibles seulement en Dieu. (Il en est de même pour beaucoup de couples de contraires, comme les Pythagoriciens l’avaient compris.)

On ne peut penser Dieu à la fois, non pas successivement, comme trois et un (chose à quoi peu de catholiques parviennent) qu’en Le pensant à la fois comme personnel et impersonnel. Autrement on se représente, tantôt une seule Personne divine, tantôt trois Dieux. Beaucoup de chrétiens confondent cette oscillation avec la vraie foi.

Des saints d’une très haute spiritualité, comme saint Jean de la Croix, ont saisi simultanément et avec une force égale l’aspect personnel et l’aspect impersonnel de Dieu. Des âmes moins avancées portent leur attention et leur foi surtout ou