Page:Weil - Lettre à un religieux, 1951.djvu/77

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fausse conception d’une obligation de l’intelligence. Toute obligation autre que l’attention elle-même imposée à l’intelligence dans l’exercice de sa fonction étouffe l’âme. Toute l’âme, et non pas l’intelligence seule.

28o La juridiction de l’Église en matière de foi est bonne pour autant qu’elle impose à l’intelligence une certaine discipline de l’attention. Aussi pour autant qu’elle l’empêche d’entrer dans le domaine des Mystères, qui lui est étranger, et d’y divaguer.

Elle est tout à fait mauvaise en tant qu’elle empêche l’intelligence, dans l’investigation des vérités qui lui sont propres, d’user avec une liberté totale de la lumière diffusée dans l’âme par la contemplation amoureuse. La liberté totale dans son domaine est essentielle à l’intelligence. L’intelligence doit ou s’exercer avec une liberté totale, ou se taire. Dans son domaine l’Église n’a aucun droit de juridiction, et par suite, notamment, toutes les « définitions » où il est question de preuves sont illégitimes.

Pour autant que « Dieu existe » est une proposition intellectuelle — mais seulement dans cette mesure — on peut la nier sans