Page:Weil - Oppression et Liberté, 1955.djvu/12

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NOTE DE L’ÉDITEUR


Au centre du recueil que nous publions aujourd’hui se trouve une étude que Simone Weil elle-même a considérée longtemps comme son œuvre principale, les Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale. Ce texte qui comprend 114 pages dactylographiées a été écrit en 1934. Simone Weil en a parlé à plusieurs reprises, autour d’elle, ou dans des lettres qui ont été retrouvées. Chaque fois, ses déclarations ont témoigné de l’importance particulière qu’elle attachait à ce grand essai. L’abondance des plans, des notes et des fragments qui s’y rattachent révèlent aussi la place exceptionnelle que ce travail a tenu dans sa vie. En 1940 encore, au moment où elle essayait de quitter la France, elle écrivait à un ami :

« … Il y a à Paris, dans ma serviette, un texte en prose, fort long, dactylographié, dont j’ai oublié le titre, mais il y a en épigraphe une citation de Spinoza. C’est essentiellement une analyse de l’oppression politique et sociale, de ses causes permanentes, de son mécanisme, de ses formes actuelles. Cela date de 1934. C’est très actuel, également. Cela vaudrait la peine, je crois, de ne pas être perdu. Mais je ne sais pas s’il serait prudent de le prendre chez vous. Lisez-le et appréciez vous-même… Je regrette bien maintenant de ne l’avoir pas publié. Je voulais d’abord le récrire à cause de l’imperfection de la forme, et mon état physique m’en a toujours empêchée. On ne peut pas publier cela maintenant. Le poème, en revanche, on peut le publier, je crois. Je vous le confie. Ne l’oubliez pas. Car moi, je ne m’en occuperai plus, et bien qu’on ne puisse prévoir ce que l’avenir amènera, je pars sans esprit de retour. Ce n’est pas simplement à cause des circonstances. J’ai toujours pensé qu’un jour je partirais ainsi. »

Dans le présent recueil, qui réunit les études consacrées par Simone Weil à la critique sociale et politique, les Réflexions sur les