Page:Weil - Oppression et Liberté, 1955.djvu/172

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rieuse et maléfique, qui suscite les phénomènes dont elle a besoin, et dont les désirs et les ruses expliquent à peu près tout ce qui se passe. La littérature communiste plus sérieuse n’échappe pas entièrement à ce ridicule, et cela même dans les groupements d’opposition, même dans certaines analyses de Trotsky. Et bien entendu, les conceptions politiques, n’étant pas appuyées sur l’économie et ne pouvant pas plus avancer dans le vide qu’un oiseau ne pourrait voler sans la résistance de l’air, sont celles que nous ont léguées l’avant-guerre et la guerre. Le réformisme reste ce qu’il a toujours été ; l’idéologie anarchiste aussi ; les syndicalistes révolutionnaires rêvent à la vieille C.G.T. ; les communistes orthodoxes et oppositionnels se disputent pour savoir qui imite le mieux le parti bolchévik d’avant-guerre. Tous traversent en inconscients cette période si neuve où nous sommes, période qu’aucune des analyses précédemment faites ne permet de définir, et où il semble que les corps soient seuls à vivre, alors que les esprits se meuvent encore dans le monde disparu de l’avant-guerre.