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Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/137

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des champs et tuer des hommes, choses rapides, sur ceux qui savent faire surgir le blé et élever les enfants, choses lentes. Or l’espace ne l’exprime d’aucune manière, lui qui est indifférent à toutes les directions. Le poids non plus ne l’exprime pas, car les poids de la dynamique sont des poids élastiques qui ne tombent jamais sans rebondir ; il faut qu’ils soient tels pour l’expression de la nécessité essentielle du travail humain, transportée par le physicien dans la nature, à savoir que rien au monde ne peut en dispenser. Mais dès lors il faut ajouter quelque chose à la notion d’énergie, définie par les distances et les poids, pour exprimer la condition de toute action humaine. Il faut ajouter que toute transformation a un sens n’est pas indifférent. Mais il faut le dire en une formule algébrique, dans le langage de la mathématique appliquée à la physique. Clausius y parvint, et inventa ainsi ce qu’on nomme l’entropie.

On pose que dans tout phénomène il se produit une transformation de l’énergie, telle qu’il ne se trouve aucun moyen quoi qu’il arrive, une fois le phénomène achevé, de rétablir exactement partout l’état initial. On traduit ce principe par la fiction d’une grandeur qui, dans tout système où a lieu un changement, augmente toujours, sauf intervention de facteurs extérieurs ; seuls sont exceptés les phénomènes purement mécaniques, non accompagnés d’échauffement ou de refroidissement, mais il n’y en a pas. La recherche d’une formule algébrique pour cette grandeur est le triomphe le plus complet de la notion de limite trouvée autrefois par Eudoxe en même temps que le calcul intégral ; car il n’y est question que de limites. Puisqu’il s’agit de variations liées à celles de la chaleur, on cherche un cas, bien entendu impossible, où un