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Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/170

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époque aussi, l’entropie a été calculée d’après la relation entre l’énergie, le volume et la température dans les gaz parfaits, ainsi nommés parce qu’ils n’existent pas. Le géomètre, toutes les fois qu’il examine un problème, conçoit un système parfaitement défini par quelques éléments — positions, distances, angles — qu’il s’est lui-même donnés ; il trace une figure propre à lui faire imaginer ces éléments ; si elle le porte aussi, en même temps, à imaginer autre chose que ce qu’il s’est donné lui-même, ou il en fait abstraction, ou il change la figure ; mais en aucun cas il ne se donne licence d’imaginer autre chose que ce qu’il s’est donné lui-même et qui est exprimable en un petit nombre de phrases. De même un physicien, quand il étudie un phénomène, conçoit un système parfaitement défini, parfaitement clos, où il ne laisse entrer que ce qu’il s’est lui-même donné et qui est exprimable en un petit nombre de phrases. Souvent il représente son système, à la manière du mathématicien, par des figures, par des formules ; mais il le représente aussi par des objets, et c’est ce qu’on appelle faire une expérience. Son système contient ou ne contient pas un facteur de changement ; dans le premier cas, le physicien, dans son esprit, conduit le système défini par lui d’un état initial à un état final par l’intermédiaire de la nécessité ; et il cherchera un dispositif expérimental dont l’état initial d’abord imite l’état initial du système clos comme un triangle à la craie imite le triangle théorique, puis dont la transformation ait avec celle du système clos le même rapport. S’il s’agit d’un état d’équilibre, au contraire, le dispositif expérimental doit rester immobile. Bien entendu, tantôt il y a réussite et tantôt non.

S’il n’y a pas réussite, le physicien peut modifier