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Page:Weil - Sur la science, 1966.djvu/50

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le plus d’ordre, comme celui des tisserands, des brodeuses ou des dentellières. Quant à la partie proprement physique de la science cartésienne, on sait assez, par les innombrables exemples qu’on peut en trouver dans le Monde, les Principes, les Météores, qu’elle s’aide des comparaisons les plus familières, tirées parfois de la nature la plus proche de nous, comme les tourbillons des rivières, mais surtout des métiers et des outils, de la fronde, du raisin qu’on presse. On pourrait croire que ces comparaisons se sont que des moyens de vulgarisation ; elles sont au contraire la substance même de la physique cartésienne, comme Descartes a soin de l’expliquer à Morin : « Et j’ai dû me servir de ces boules sensibles, pour expliquer leur tournoiement, plutôt que des parties de la matière subtile qui sont insensibles, afin de soumettre mes raisons à l’examen des sens, ainsi que je tâche toujours de le faire » (II, p. 366), et, plus significativement encore : « Il est vrai que les comparaisons dont on a coutume d’user dans l’École, expliquant les choses intellectuelles par les corporelles, les substances par les accidents, ou du moins une qualité par une autre d’une autre espèce, n’instruisent que fort peu ; mais pour ce qu’en celles dont je me sers, je ne compare que des mouvements à d’autres mouvements, ou des figures à d’autres figures, etc., c’est-à-dire, que des choses qui à cause de leur petitesse ne peuvent tomber sous nos sens à d’autres qui y tombent, et qui d’ailleurs ne diffèrent pas davantage d’elles qu’un grand cercle diffère d’un petit cercle, je prétends qu’elles sont le moyen le plus propre, pour expliquer la vérité des questions physiques, que l’esprit humain puisse avoir ; jusque-là que, lors qu’on assure quelque chose touchant la nature qui ne peut être expliquée