Page:Weil et Chénin, Contes et récits du XIXe siècle - 1913.djvu/192

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qu'on tuait, celle de ceux qui se mouraient, celle de ceux qui allaient mourir. Il y avait des cris singuliers, des intonations d'une détresse profonde qui semblaient dire des mots qu'on aurait presque pu comprendre. En ce moment j'ai eu* l'idée d'une ville terrible, de quelque 'ville épouvantable et déme- surée, comme serait une Babylone ou une Babel de canni- bales où il y aurait des abattoirs d'hommes; et j'ai cherché à retrouver quelque chose des agonies humaines, dans ces égor- hrèments qui bramaient et sanglotaient. J'ai songé à des trou- peaux d'esclaves amenés là, la corde au cou, et noués à des an- neaux, pour nourrir des maîtres qui les mangeaient sur des tables d'ivoire, en s'essuyant les lèvres à des nappes de pourpre. Auraient-ils des poses plus abattues, des regards plus tristes, dès prières plus déchirantes?. G. Flaubert, Par les Champs et par les Grèves (Fasquelle, édit).