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grecque, c’est bien vieux, et que la jurisprudence ni les traités n’entravent guère la liberté de traduction à leur égard. Mais Gœthe n’est déjà pas si antique ! Admettra-t-on qu’il eût pu empêcher par commandement exprès Pierre Leroux, son jeune contemporain, d’entreprendre la traduction de Werther, qui est l’un des modèles de la prose poétique française au xixe siècle ? Mais Alarcon, selon certains biographes, était peut-être encore vivant quand Corneille tira le Meilleur de la Verdad sospechosa. Corneille, en écrivant le Menteur, ne s’est même pas donné la peine d’adapter son original ; il ne s’est pas contenté de prendre la liberté grande de l’imiter, il l’a traduit à la bonne franquette ; pour la plus forte part, le Menteur n’est qu’une traduction, vers pour vers, de la Verdad sospechosa. Il est aisé de s’en assurer en se reportant au Mémoire du savant Viguier, que M. Marty-Laveaux a inséré dans son édition de Corneille[1]. Mais on s’assurera encore plus, si l’on compare d’un esprit attentif les passages d’Alarcon, cités par Viguier, avec les textes correspondants de Corneille, que Dorante, qui ne débite que des choses traduites et tournées de l’espagnol, est Français de la plante des pieds à la pointe des

  1. Les Grands Écrivains de la France : Œuvres de Corneille. Paris, Hachette.