Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/152

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quoi lui plaît-il de se reconnaître dans mon tableau qui représente des choses d’Orient ? Il se reconnaît, cependant ; et ce qui l’irrite, ce qui est l’unique cause du procès qu’il m’intente, c’est que je l’ai fait marchand et Juif. Il paraît que, ce faisant, je lui cause dommage. J’attends, messieurs, comment vous allez vous y prendre pour déclarer du haut de votre siège vénérable, d’où ne tombent que des paroles d’autorité et de vérité, qu’on nuit à son semblable en le qualifiant de Juif.

» Là seulement est le procès. Si j’avais reproduit mon glorieux contemporain sous les traits d’un Apollon qui régénère la scène française épuisée, il ne m’eût pas envoyé de papier timbré. Vous connaissez, messieurs, la légende du colonel, du sergent et du conscrit. Le sergent requiert le renvoi du conscrit devant le conseil de guerre. — Et qu’a-t-il fait ? dit le colonel. — Il m’a grossièrement insulté dans le service. — Le colonel jette au conscrit un regard terrible : Sergent, le coupable sera puni ; quelle est l’insulte ? — Devant tout le peloton, le conscrit m’a dit que je n’étais qu’un Auvergnat. — Le colonel sursaute, il se recueille et rend la sentence : Conscrit, ne craignez rien ; et vous, sergent, rendez-vous à la salle de police. Sergent, vous m’avez froissé ; je suis du Cantal.

» Messieurs, je ne demande pas que vous fassiez