Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/33

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pour le public, lui qui a été toute sa vie le favori, et, en certains jours, un favori presque scandaleux du public !

Qui ne croirait M. Dumas un homme heureux ? Il possède un bel hôtel avenue de Villiers, et, dans cet hôtel, un réduit, un chalet mystique, comme l’édition des comédiens. Il s’est fait et il a associé en lui deux existences, d’ordinaire incompatibles, qui sont l’une et l’autre une égale source de félicités : la vie sage et rangée du chef de famille, la vie avec des ailes de l’artiste qui vagabonde, impatient du joug, parmi le chœur des Grâces et des Muses. Père de famille, il a la pleine confiance et le dévouement des siens ; artiste, de belles dames studieuses ont fait de lui leur dieu ; de belles comédiennes l’ont adoré, en tout bien tout honneur ; les unes et les autres l’ont pris et le prennent pour directeur de conscience ; c’est un confesseur laïque ; il fait concurrence à Bellac. On l’a acclamé dès la jeunesse ; et, depuis, il n’a cessé de marcher de victoire en victoire. Il n’a pas été écrasé comme Flaubert sous le poids d’un premier succès. Le Demi-Monde a été un plus éclatant triomphe que la Dame aux Camélias. Il n’a pas été écrasé, non plus, sous le poids du nom qu’il porte. Il nous offre le phénomène, à peu près unique dans notre histoire littéraire, du fils d’un glorieux écrivain qui a réussi à se faire écouter