Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/379

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Des deux personnages qu’il a mis en scène, en 1824, dans l’ode intitulée le Poète dans les révolutions, l’un, l’homme pratique et expérimenté, exhorte le poète à se désintéresser de la lutte contre le mal et pour le mieux ; l’autre, le fou, le poète, veut s’y jeter à corps perdu. Le premier dit au poète :


Jeune homme, ainsi le sort nous presse,
Ne joins pas dans ta folle ivresse,
Les maux du monde à ton malheur…
· · · · · · · · · · · · · · · · · · ·
Les hommes vont aux précipices,
Tes chants ne les sauveront pas.


Le poète lui répond avec enthousiasme :

Le poète, en des temps de crime,
Fidèle aux justes qu’on opprime
Célèbre, imite les héros…


Ces deux personnages de son poème, Hugo les a heureusement associés et fondus dans sa vie. Il a été l’enthousiaste et le bon ménager. Il a été, comme Gœthe, un poète et un sage. Il a embrassé fièrement son devoir dans les heures difficiles et cruelles ; il a défendu le droit et son droit ; il s’est acquis le moyen de subsister indépendant de son époque et de ses tristes vicissitudes, et il est mort, comblé de jours, sous un toit à lui, au milieu des