Page:Weiss - À propos de théâtre, 1893.djvu/59

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je le connais depuis que j’écris, et tous ceux qui écrivent, de quelque moment qu’ils soient, le connaissaient avant qu’ils aient taillé pour la première fois leur plume. Toujours par les rues, les places, les coulisses, les bureaux de rédaction ; et toujours le premier sur le boulevard à l’heure du toc-toc et du frou-frou, vers trois heures et demie, toujours le dernier, vers une heure et demie du matin, devant le café Riche, le cigare à la bouche, quand Bignon éteint le gaz et que les automédons en maraude cherchent un bourgeois qui veuille bien les conduire à la porte de Levallois ou à la porte de Charenton. Si M. Claudin n’était chrétien et arya, ce qui se fait rare, chrétien et arya authentiques de la Ferté-sous-Jouarre, on le prendrait pour Isaac Laquedem journaliste. Il a toujours vécu. Il a toujours été partie intégrante de Paris. Il a toujours eu cinq sous dans sa poche pour le pourboire du cocher. Il a toujours été jeune. Il parle de mademoiselle Mars en dilettante qui l’a particulièrement fréquentée, et sa discrétion éprouvée de galant homme l’empêche seule d’avouer qu’il a été son premier amant. Pour moi, toute ma vie, j’ai entendu parler « du vieux Schramm » dans le militaire et « du jeune Claudin » dans le civil. La première fois que je publiai à Paris un article de littérature — c’était sur Gœthe à la Revue de l’instruction publique en 1855