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la chambre rouge

J’étendis les bras en un vain effort pour repousser ces écrasantes ténèbres et, de toutes mes forces, je me mis à crier — une fois, deux fois, trois fois. — Alors je dus sans doute me relever en trébuchant. Je me souvins que je pensai soudain au corridor éclairé par la lune et, tête baissée et les bras en avant, je fonçai vers la porte.

Mais j’avais oublié à quel endroit elle se trouvait exactement et je me heurtai violemment contre le coin du lit. Je chancelai et, me retournant, je fus cogné ou me cognai moi-même contre quelque autre gros meuble. J’ai un vague souvenir d’être allé butter, culbuter de ci de là dans les ténèbres, de m’être débattu contre mille entraves et d’avoir poussé des cris farouches à chaque nouveau heurt, et enfin d’un coup violent que je reçus au front, avec une horrible sensation de chute qui dura un siècle, de mon dernier et frénétique effort pour rester debout… Ensuite je ne me rappelle plus rien…

Quand j’ouvris les yeux, il faisait grand jour. J’avais la tête sommairement bandée et l’homme au bras paralysé épiait ma figure. Je regardai autour de moi, essayant de me rappeler ce qui était arrivé et, pendant un certain temps, je ne pus me reconnaître. Du coin de l’œil j’aperçus la vieille femme qui, n’ayant plus son air absorbé de la veille, versait dans un verre quelques gouttes d’une drogue contenue dans une petite fiole bleue.