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Page:Wells Ile du Docteur Moreau 1896.djvu/155

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l’île du docteur moreau

pour lesquelles le vieil instinct était en conflit avec les intentions de Moreau, se trouvaient moins stables. Une série de propositions appelées : la Loi, — les litanies que j’avais entendues — bataillaient dans leurs cerveaux contre les appétits profondément enracinés et toujours rebelles de leur nature animale. Ils répétaient sans cesse cette loi et la transgressaient sans cesse. Montgomery et Moreau déployaient une surveillance particulière pour leur laisser ignorer le goût du sang. Ils redoutaient les suggestions inévitables de cette saveur.

Montgomery me conta que le joug de la loi, spécialement parmi les monstres félins, s’affaiblissait singulièrement à la nuit tombante ; l’animal, en eux, était alors prédominant ; au crépuscule, un esprit d’aventure les agitait et ils osaient alors des choses qui ne leur seraient pas venues à l’idée pendant le jour. C’est à cela que j’avais dû d’être pourchassé par l’Homme-Léopard, le soir de mon arrivée. Mais, dans les premiers temps de mon séjour, ils n’osaient enfreindre la loi que furtivement et après le coucher du soleil ; au grand jour, il y avait, latent, un respect général pour les diverses prohibitions.

C’est ici peut-être le moment de donner quelques