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l’île du docteur moreau

Tout autour de moi les masses vertes du fourré craquaient et s’écartaient pour livrer passage à ces bêtes humanisées, qui apparaissaient une à une.

— Ne le tuez pas, Prendick, cria Moreau, ne le tuez pas !

Je le vis s’incliner en se frayant un chemin parmi les tiges des grandes fougères.

L’instant d’après, il avait chassé, avec le manche de son fouet, l’Hyène-Porc, et Montgomery et lui maintenaient en respect les autres bipèdes carnivores, et en particulier M’ling, anxieux de prendre part à la curée. Sous mon bras, le monstre au poil argenté passa sa tête et renifla. Les autres, dans leur ardeur bestiale, me poussaient pour mieux voir.

— Le diable soit de vous, Prendick ! s’exclama… Moreau. Je le voulais vivant.

— J’en suis fâché, répliquai-je, bien qu’au contraire je fusse fort satisfait, je n’ai pu résister à une impulsion irréfléchie.

Je me sentais malade d’épuisement et de surexcitation. Tournant les talons, je laissai là toute la troupe et remontai seul la pente qui menait vers la partie supérieure du promontoire. Moreau cria des ordres, et j’entendis les trois Hommes-Taureaux traîner la victime vers la mer.