Page:Weustenraad - Poésies lyriques, 1848.djvu/276

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Que ce calme sauveur, après tant de tempêtes,
Ne nous inspire point trop de sécurité.
Honte à qui sacrifie, au milieu de nos fêtes,
A d’énervants plaisirs sa mâle puberté !
Honte à qui lâchement s’endort dans la mollesse
Aux pieds de quelqu’idole indigne d’un grand cœur !
Honte à qui chante et rit, sourd aux cris de détresse
Du Faible en proie à l’Oppresseur !

L’Orient saigne encore étendu sur ses armes,
Le Nord sous ses glaçons se dresse en conquérant,
Le Midi convulsif se débat dans les larmes,
L’Occident manque d’air et cherche un ciel plus grand ;
Partout, d’un pôle à l’autre, une lutte s’apprête :
Les Peuples et les Rois se mesurent des yeux,
Et le Pauvre, à son tour, levant sa large tête,
Jette au Riche un défi haineux.

Préparons-nous donc tous à quelque grand spectacle !
Le monde tel qu’il est ne saurait plus durer ;
Il sent, à ses douleurs, qu’un suprême miracle
Palpite dans ses flancs prêts à se déchirer ;
Il sent que l’Anarchie, alliée à la Guerre,
Qui, depuis trois mille ans, désole tour à tour
L’atelier, le palais, le temple, la chaumière,
Touche enfin à son dernier jour.