Page:Wharton - Les Metteurs en scène, 1909.djvu/136

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courut le long du quai avec un plateau de sandwichs desséchés ; un porteur en retard jeta dans une voiture de troisième classe un paquet de châles et de cartons : l’employé répéta un Partenza ! très bref, d’où l’on pouvait conclure que le premier appel avait été purement de parade, — et le train roula hors de la gare.

La direction de la voie avait changé : un rayon de soleil, par-dessus les poussiéreux coussins de velours rouge, atteignit le coin de Lydia. Gannett n’y prit point garde. Il s’était replongé dans sa Revue de Paris, et Lydia dut se lever pour baisser le store. Sur le vaste horizon de leur existence inoccupée, de tels incidents se dessinaient nettement.

Après avoir baissé le store, Lydia se rassit, laissant toute la longueur du compartiment entre elle et Gannett. À la fin, il s’aperçut qu’elle n’était plus en face de lui et leva la tête.

— J’ai fui le soleil, expliqua-t-elle.

Il la regarda curieusement : à travers le store, le soleil frappait encore son visage.

— Très bien, dit-il tranquillement.

Et, tirant de sa poche un étui à cigarettes, il reprit :

— Vous permettez ?…

Ce fut pour elle un repos, un relâche à la tension de son esprit, cette idée qu’après tout,