Page:Wharton - Les Metteurs en scène, 1909.djvu/210

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n’y a jamais eu de notre vie, jusqu’au bout il y a eu sa vie et ma vie

« Si vous saviez quel soulagement c’est pour moi de dire enfin tout ceci à quelqu’un, vous supporteriez que je vous fasse mal ! Je ne serai jamais plus aussi isolée, maintenant que quelqu’un d’autre sait ce qui en est.

« Laissez-moi commencer par le commencement. Quand je rencontrai Vincent Rendle pour la première fois, il y a vingt ans, je n’avais pas vingt-cinq ans. De ce jour-là, jusqu’à sa mort, nous avons été d’excellents amis l’un pour l’autre. Il m’a donné quinze années, les meilleures peut-être de sa vie. Le monde entier, vous le savez, trouve que ses plus beaux poèmes furent écrits pendant cette période-là. Je suis censée les avoir « inspirés » et, jusqu’à un certain point, c’est vrai. Dès le début, la sympathie intellectuelle entre nous fut presque complète. Il me semble que mon esprit a dû être pour lui comme un instrument parfaitement harmonieux sur lequel il n’était jamais las de jouer. Quelqu’un me répéta depuis qu’il avait dit une fois que « je comprenais toujours ». C’est le seul éloge que je sache qu’il m’ait décerné. J’ignore même s’il me trouvait jolie, quoique je ne suppose pas que ma figure lui déplût, car il avait horreur des gens laids. En tout cas il s’accou-