Page:Wharton - Sous la neige, 1923.djvu/45

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glissait même dans la cuisine pour laver le plancher ; et Zeena, un jour, l’avait surpris à la baratte, et lui avait lancé, en s’en allant, un de ses coups d’œil muets et énigmatiques.

Récemment, il avait recueilli d’autres indices de sa mauvaise humeur, aussi subtils et plus inquiétants. Par un matin rigoureux, comme il s’habillait à la lueur douteuse de la chandelle, il avait entendu derrière lui la voix de sa femme encore couchée.

— Le médecin trouve qu’on ne devrait pas me laisser ainsi, sans personne pour m’aider, dit-elle de sa voix geignarde.

Ethan l’avait crue endormie, et il eut un mouvement de surprise, bien qu’il fût habitué chez elle à de brusques explosions de paroles après de longs intervalles d’un silence sournois.

Il se tourna vers le lit et la regarda, enfouie dans l’ombre, sous le couvre-pied de calicot foncé. Sur la blancheur de l’oreiller son visage osseux avait pris une teinte terreuse.

— Personne pour vous aider ?… reprit-il.

— Puisque vous dites que nous n’avons pas les moyens d’engager une servante quand Mattie s’en ira.

Frome se détourna de nouveau. Le rasoir en main,