Page:Wiele - Ame blanche.djvu/108

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
106
ÂME BLANCHE

de la pauvre femme m’avait inspiré jusqu’alors. Je me sentais seule au monde pour la chérir et pour la plaindre, et je souffrais atrocement de mon impuissance à rien faire pour elle.

Je crois que Véronique me mena en une ferme où l’on nous servit un déjeuner de laitage et d’œufs frais ; je crois aussi que la bonne fille s’ingénia à me distraire en me faisant marcher longtemps dans la campagne, en me cueillant des bouquets et en me tressant des couronnes de marguerites…, mais je sais bien que je demeurai navrée, recueillie en moi-même et fort taciturne, durant tout ce temps-là.

— Allons-nous reprendre l’omnibus de Saint-Gilles ? me demanda ma compagne, comme sa montre marquait quatre heures et que les premières brumes commençaient à rendre vagues et gris les lointains du panorama de Bruxelles et de ses environs étendu à gauche de la chaussée d’Alsemberg,

— Oui, prenons-le, dis-je machinalement.

Mais je voulus d’abord revenir sur nos pas pour voir une dernière fois l’hospice du professeur Oppelt ; et quand nous fûmes devant cette maison, j’envoyai des baisers à sa façade rose, je murmurai :

— Maman, maman, dormez bien ! doucement, câlinement, comme si elle eût été un baby et qu’elle eût pu m’entendre.