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ÂME BLANCHE

comme de la sienne propre et, sans bien m’expliquer pourquoi, j’eus quelque satisfaction de ce sans-gêne.

Il continuait, s’adressant plus particulièrement à mon oncle :

— C’est dur, voyez-vous, Monsieur, de n’avoir point de foyer à soi, aucun logis dont l’on puisse se dire qu’il vous est personnel ! Et il y a des années, tant d’années que je suis privé de ce modeste bonheur !

Sa voix s’était attendrie, avait presque sombré sous les dernières phrases et j’admirai combien ses paroles traduisaient exactement mes propres aspirations et l’ardent désir de mon âme, possédée de regrets et de rêves identiques.

J’eus un soupir qu’il dut comprendre, qu’il interpréta, non sans justesse car il me dit, avec une petite tape familière sur mon épaule :

— Hein, Lina, nous avons eu une triste enfance, nous deux ?

Je reculai, un peu choquée de son geste, bien que je sentisse parfaitement la qualité de l’inspiration qui le lui avait suggéré. Et je ne pus m’empêcher de penser :

— C’est singulier comme Jacques manque de distinction ; il n’était pas ainsi autrefois.

Sa toilette me paraissait plus provinciale que jamais, sa voix sonore, ses éclats de rire retentissants, ses mouvements naturels et spontanés, sans manière, étaient, pour moi, comme autant