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ÂME BLANCHE

pour faire place à des costumes austères, roides, laids comme ces vêtements confectionnés à la grosse, dans les prisons, à l’usage des jeunes détenus. Et le premier mouvement d’autorité qu’on eût voulu exercer sur moi, dans la maison, avait été de me couper les cheveux. Mais je fis une héroïque résistance et comme ma grand’mère, que ces longs cheveux frisés ennuyaient beaucoup le matin, à l’heure du démêlage, levait déjà ses ciseaux pour les supprimer :

— N’y touchez pas ! m’écriais-je avec une véhémence qui arrêta net son geste.

J’eus le malheur d’ajouter :

— Maman les aime.

— Je le sais bien ; c’est encore une idée à elle, ça…, ces longs cheveux flottants qui vous donnent l’air d’une pas grand’chose.

— Papa les aimait ! dis-je encore, si émue que ma voix en était toute tremblante.

— C’est vrai, Jules les aimait, appuya Mlle Josine, présente à la scène.

Et l’effet fut magique ; on respecta ma chevelure. Mais une science précoce venait d’assombrir à jamais ma jeune intelligence : j’avais mesuré toute l’antipathie éprouvée contre ma mère par ceux qui m’élevaient.

Chaque trimestre, quand il s’agissait de payer sa pension, il y avait rue Marcq — et bien que l’argent de cette dépense fût bien à elle, la pauvre femme ! — il y avait contre