Page:Wilde - Salomé, Librairie de l'art indépendant, 1893.djvu/18

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yeux de taupe sous ses paupières tremblantes ?… C’est étrange que le mari de ma mère me regarde comme cela. Je ne sais pas ce que cela veut dire… Au fait, si, je le sais.

LE JEUNE SYRIEN

Vous venez de quitter le festin, princesse ?

SALOMÉ

Comme l’air est frais ici ! Enfin, ici on respire ! Là-dedans il y a des Juifs de Jérusalem qui se déchirent à cause de leurs ridicules cérémonies, et des barbares qui boivent toujours et jettent leur vin sur les dalles, et des Grecs de Smyrne avec leurs yeux peints et leurs joues fardées, et leurs cheveux frisés en spirales, et des Égyptiens, silencieux, subtils, avec leurs ongles de jade et leurs manteaux bruns, et des Romains avec leur brutalité, leur lourdeur, leurs gros mots. Ah ! que je déteste les Romains ! Ce sont des gens communs, et ils se donnent des airs de grands seigneurs.

LE JEUNE SYRIEN

Ne voulez-vous pas vous asseoir, princesse ?

LE PAGE D’HERODIAS

Pourquoi lui parler ? Pourquoi la regarder ?… Oh ! il va arriver un malheur.