Page:William Morris - Nouvelles de Nulle Part.djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Car le conflit lui-même, à une époque où, comme je vous l’ai dit, les hommes de quelque vigueur d’esprit rejetaient toute considération des soucis ordinaires de la vie, développait en eux le talent nécessaire. D’après tout ce que j’ai lu et entendu, je doute fort que, sans cette guerre en apparence effroyable, le talent spécial pour l’administration se serait développé parmi les ouvriers. Quoi qu’il en soit, ce talent se trouva, et ils eurent bientôt des chefs bien mieux qu’égaux aux meilleurs hommes des réactionnaires. D’ailleurs, ils n’avaient pas de difficulté quant au matériel de leur armée ; car l’instinct révolutionnaire s’exerça sur les soldats réguliers, si bien que le plus grand nombre, certainement les meilleurs des soldats, passèrent du côté du peuple. Mais l’élément principal de leur succès fut que, partout où les ouvriers ne furent pas contraints, ils travaillèrent, non pour les réactionnaires, mais pour « les rebelles ». Les réactionnaires ne purent obtenir aucun travail pour eux, en dehors des régions où ils étaient tout puissants ; et même dans ces régions, ils furent inquiétés par de continuels soulèvements ; et dans tous les cas et partout, ils ne purent rien obtenir sans obstruction, mauvaise volonté et nonchalance ; en sorte que non seulement leurs armées étaient excédées par toutes les difficultés qu’elles avaient à vaincre, mais les non-combattants de leur parti étaient tellement obsédés de haine et de mille menus ennuis et désagréments, que la vie leur devint presque insupportable dans ces conditions. Bon nombre d’entre