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L’APPEL DU CHIBOUGAMAU

maîtres quelques verres de whisky. Cet homme n’était pas en service, un samedi après-midi et comme je suis moi-même un buveur grégaire, c’est-à-dire incapable de boire seul, je lui offris de partager ma bouteille. Il but deux coups rapidement, puis se mit à faire des moulinets avec ses bras.

Ce que voyant je rebouchai la bouteille d’eau de vie et quittai les lieux. Ce soir-là, le contremaître devait aller jouer au poker chez Bill. « Il jouait avec ses pouces et gâta la partie » me dit Bill ; « ne donnez jamais d’alcool à ce type-là. Il ne peut prendre qu’un verre sans se déplacer ; il devient gris au deuxième ; au troisième, il se prend pour Jack Dempsey. C’est bien malcommode »…

Les autres directeurs de la compagnie O’Connell étaient aussi efficaces que Bill. Rien qu’à les voir exécuter ou donner un ordre, on se rendait compte qu’ils connaissaient la construction des routes de A jusqu’à Z. J’en accompagnai un qui s’en allait faire sauter un immense quartier de roc. Il dessina des marques sur la pierre et ordonna aux foreurs de percer des trous aux endroits désignés. Quelques jours plus tard, les trous furent remplis de dynamite, puis reliés par des fils électriques à un commutateur central. Lorsque survint l’explosion, je crus que la calotte de la planète avait sauté ; mais plus tard, je constatai que la coupure était aussi nette que s’il s’était agi d’une masse de beurre taillée au couteau.

Herb. O’Connell avait le don de se choisir des hommes capables et loyaux pour ses postes importants. Voilà sûrement l’un des secrets du succès de son entreprise considérable.

La glace s’amincissait sur le lac Chibougamau et un soir de la fin de mai, un vent vif se leva. Le lendemain matin, toute la glace s’était évanouie. (La fin de la période