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L’APPEL DU CHIBOUGAMAU

teur, à la solde des manipulateurs de titres les plus écœurants que vous ayez jamais rencontrés » ; « Cet ingénieur minier a rédigé des douzaines de rapports ambigus pour des compagnies malhonnêtes : il est aussi franc qu’une fausse pièce de trente sous » ; « Ces jeunes prospecteurs sont croches et faux, ils n’observent jamais cette éthique rigoureuse que nous suivons toujours, nous autres, les vieux de la vieille » ; « Les prospecteurs à l’ancienne mode ne peuvent lutter contre les méthodes de la science moderne et ils finiront tous leurs jours à l’hospice. »

Et ainsi de suite, sans arrêt… et sans aucune signification.

Pourtant, géologues, ingénieurs miniers et prospecteurs s’accordaient sur un point : On finirait par trouver des gisements de grande valeur au Chibougamau.

Particularité étrange, la population de la région du Lac Saint-Jean qui comptait plus de 200,000 âmes, s’intéressait très peu aux développements préliminaires de la zone minière du Chibougamau, pourtant si riche en puissance, et située à 150 milles à peine de chez eux. Il nous arrivait, des fermes et des chantiers autour du lac Saint-Jean, des experts de la brousse, des bûcherons et des cuisiniers ; mais la vaste majorité des prospecteurs, ingénieurs miniers, promoteurs et géologues venaient de l’ouest du Québec, de l’Ontario et des États-Unis.

C’est que le signe caractéristique du cultivateur et du coupeur de bois du lac Saint-Jean est la satisfaction de soi-même. « Les tribus sédentaires des pays arabes sont toujours envieuses des nomades qui les environnent, » écrit Doughty dans « Arabia Deserta ». Ce n’est pas le cas en ce qui concerne les habitants du lac Saint-Jean. Les paysans de cette contrée — qui marque la limite septentrionale de l’agriculture — regardent le prospecteur errant avec des yeux amusés et tolérants, mais nullement hai-