Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/121

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vements des astres depuis l’époque des premières observations précises. Mais déjà lorsque nous voulons remonter jusqu’aux époques éloignées de l’histoire, la comparaison des éclipses fait ressortir dans le mouvement de la Lune une accélération dont l’explication ne semble pas pouvoir être demandée à la Mécanique céleste de Laplace. L’influence du frottement des marées, suivant les uns, la résistance du milieu interplanétaire, suivant les autres, doivent être prises en sérieuse considération. Les idées que nous nous étions faites de la stabilité du système du monde reçoivent, de l’introduction de ces causes de perturbation, de sérieuses atteintes. Sans doute leur action ne devient sensible qu’au bout d’un nombre énorme d’années, et semble n’intéresser que très faiblement les mouvements et les positions relatives des astres pendant la durée de la vie humaine et peut-être de la vie de l’humanité. Déjà, en effet, les conditions climatériques assignent à la présence de l’homme sur la terre une durée assez limitée : la vie n’a pu apparaître sur notre globe que longtemps après le commencement de la formation du système, lorsque la chaleur résultant de la condensation de la nébuleuse primitive s’était déjà dissipée en partie. La continuation incessante de cette déperdition pose une autre limite où l’action calorifique et lumineuse du Soleil deviendra impuissante à entretenir la vie sur la Terre. Entre ces deux limites, il ne paraît pas que les causes perturbatrices que je viens d’énumérer puissent influencer d’une façon bien sensible les mouvements des grosses planètes ; l’analyse de Laplace suffit et suffira encore longtemps à calculer les positions de ces astres. On peut donc dire que, relativement à l’homme, le système planétaire est stable. Mais dans les longues périodes qui ont précédé la création des êtres vivants, dans les périodes illimitées qui s’écouleront après leur disparition, par conséquent dans ces temps qui sont le domaine proprement dit de la Science cosmogonique, il devient nécessaire de tenir compte de l’influence des causes qui ajoutent leur action à celle de la gravitation. L’établissement définitif d’une hypothèse cosmogonique complète exige donc l’étude complète aussi de cette influence. Nous ne pouvons aujourd’hui encore que signaler l’existence des forces mécaniques qui ont dû intervenir dans la formation des mondes et qui présideront à leur fin et peut-être à leur renouvellement.