Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/229

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formations, et qu’elle peut se dire d’elle-même ce que le poëte philosophe dit de l’éternité :

Wenn denn ein zweites Nichts wird diese Welt begraben ;
Wenn von dem Alle selbst nichts bleibet als die Stelle ;
Wenn mancher Himmel noch, von andern Sternen helle,
Wird seinen Lauf vollendet haben ;
Wirst du so jung als jetzt, von deinem Tod gleich weit,
Gleich ewig künftig sein, wie heut[1].

Von Haller.

Heureux l’esprit qui, au milieu du tumulte des éléments et des désastres de la nature, sait se maintenir à une hauteur d’où il peut voir fumer sous ses pieds les ruines qu’amoncelle la caducité des choses du monde ! Une félicité, que la raison n’oserait même pas désirer, la révélation nous enseigne à l’espérer avec une ferme confiance. Lorsque les chaînes, qui nous retiennent attachés à la vanité des créatures, seront tombées, à cet instant qui est assigné à la transformation de notre être, alors l’âme immortelle, délivrée de la dépendance des choses finies, trouvera la jouissance de la vraie félicité dans son union avec l’être infini. La vue de l’harmonie générale de la nature, dans laquelle se complaît le regard de Dieu, ne peut que remplir d’une joie éternellement durable la créature raisonnable, qui se trouve réunie à la source de toute perfection. La nature, vue de ce centre, montrera de toutes parts une éclatante stabilité, une éclatante harmonie. Ses métamorphoses incessantes ne peuvent troubler la tranquille félicité d’une âme, qui s’est une fois élevée à ces hauteurs. Pendant qu’elle déguste par avance cet état dans la douce espérance d’y arriver un jour, elle peut exercer sa bouche à ce chant de louange, dont retentira un jour toute l’éternité :

When Nature fails, and day and night
Divide thy works no more,
My ever-grateful heart, o Lord,
Thy mercy shall adore.

  1. Quand ce monde se sera enseveli dans un second néant ; quand de tout ce qui existe il ne restera que la place ; quand des cieux toujours renouvelés, illuminés d’autres étoiles, auront accompli leur cours ; tu seras toujours jeune comme maintenant, tu seras aussi loin de ta mort, tu seras éternellement à venir, comme aujourd’hui.