Page:Wolf - Les Hypothèses cosmogoniques, suivies de la Théorie du ciel de Kant, 1886.djvu/242

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desseins duquel elles sont par elles-mêmes et constamment en révolte ? Adopter ces principes erronés, ne serait-ce pas fournir aux adversaires de la Providence divine l’occasion de victoires assurées, toutes les fois qu’ils pourront signaler un but final atteint naturellement et sans contrainte spéciale par les lois générales des actions purement physiques ? Et seront-ils à court de semblables exemples ? Arrivons donc à la seule conclusion convenable et rigoureuse : c’est que la nature, abandonnée à ses propriétés générales, est féconde en productions admirablement belles et excellentes, qui non seulement portent le caractère de l’ordre et de la perfection, mais qui s’harmonisent merveilleusement avec tout ce qui les entoure, pour l’avantage de l’homme et pour la glorification des propriétés divines. Il s’ensuit que les propriétés essentielles de la nature ne peuvent être ni indépendantes ni nécessaires, mais qu’elles doivent avoir leur origine dans une intelligence unique, source et fondement de tout être, dans laquelle elles ont été conçues avec leurs relations générales. Tous les liens qui réunissent les êtres pour les faire concourir à l’harmonie générale doivent se rattacher à un être unique, qui en gouverne tout l’ensemble. Il y a donc un être des êtres, une intelligence infinie, et une sagesse existant par elle-même, de qui la nature tire la possibilité même de son existence, par qui ses destinées ont été fixées dès l’origine. On ne peut plus dès lors attaquer la puissance de production de la nature comme attentatoire à l’existence d’un être suprême ; plus elle est parfaite dans ses développements, mieux ses lois générales conduisent à l’ordre et à l’harmonie, et plus clairement elle démontre l’existence de la divinité, de qui elle emprunte ses qualités. Ses productions ne sont plus l’effet du hasard, les suites d’un accident ; tout découle de la nature d’après des lois immuables, qui doivent se montrer d’autant plus aptes à produire le beau, qu’elles sont les traits caractéristiques d’un plan souverainement sage, d’où le désordre est banni. Ce n’est pas le concours fortuit des atomes de Lucrèce qui a bâti le monde ; des forces et des lois, imposées par une intelligence et une sagesse parfaites, sont l’origine invariable de cette belle ordonnance, qui en découle non par un effet du hasard, mais d’une manière nécessaire.

Après avoir ainsi écarté un vieux préjugé sans fondement et une philosophie malsaine, qui s’efforce de cacher sous des dehors pieux